Pâques est un événement extraordinaire et par une grâce céleste il m’a été donné de trouver quelques éléments qui peuvent nous aider à approcher ce moment incroyable.
Je crois que le temps est venu que nous comprenions certaines choses et je vous emmène en haute connaissance.
Je vais vous parler tout d’abord du Satan, puis de la croix et enfin de la résurrection, car on ne comprend rien à Pâques si on ne comprend pas que, ce qui est crucifié sur la croix, ce n’est pas Jésus, c’est le Satan et que la résurrection ne consiste pas pour nous, à avoir un corps immortel mais au fait que le Christ ait libéré Adam des enfers.
Je voudrais vous montrer une autre vision de Pâques que j’ai eu la chance de recevoir à travers la tradition orthodoxe et qui n’a rien à voir avec l’imagerie de Jésus dégoulinant de sang sur une croix et que l’on retrouve ensuite avec un corps immortel.
Je voudrais vous parler du Satan crucifié sur la croix et du christ glorieux libérant Adam des enfers.
Je parlerai aujourd’hui de l’Adversaire, du Malin et du Tentateur.
Une certaine image de la résurrection, un message politique
Je pense qu’on ne comprend rien à la réalité en général et à la fête de Pâques en particulier si on ne comprend pas les éléments constitutifs de notre réalité et la signification du Christ par rapport à la réalité. Nous avons tendance à prendre les choses au pied de la lettre, nous ressentons parfois qu’il y a autre chose mais il existe une telle confusion dans notre réalité que nous avons du mal à nous y retrouver.
L’image que nous avons de la résurrection est naïve, fausse est contraire à la résurrection elle-même, à savoir : un Dieu souffrant sur une croix et, miraculeusement, l’apparition d’une vie ressuscitée. Ce message est un message politique qui consiste à dire que si nous souffrons, nous allons avoir une récompense. Jésus devient l’archétype de la souffrance et de la récompense.
La vérité, la souffrance et la récompense sont toutes autres. Nous devons sortir de la vision infantile que nous avons de Pâques et de la résurrection qui est entretenue pour des raisons politiques et qui ne conduit qu’à l’asservissement des esprits.
Deux niveaux de réalité
Pour aller dans l’essence même de cet événement extraordinaire qu’est Pâques, il est vital de comprendre qu’il y a deux niveaux de réalité : il y a ce que l’on fait et il y a ce qui EST, il y a le monde et il y a le monde qui EST, il y a l’individu et il y a l’individu qui EST, il y a la vie et il y a la Vie qui EST. Lorsque nous ne vivons pas de l’intérieur, les choses vont dans tous les sens et nous n’y comprenons rien, nous sommes dans un véritable Chaos. Dans ce Chaos, nous essayons de survivre et nous pensons qui si nous pouvons ne pas mourir et vivre confortablement, ça n’est déjà pas si mal.
Tout change lorsque nous passons à un autre niveau de réalité, à savoir la prise de conscience de la Vie qui EST. C’est ce qui se passe lorsque je vis de tout mon être, je rentre dans mon corps, je sens que j’existe et je sens que le monde existe autour de moi, je rentre dans la communion entre moi et le monde et je rentre dans le tout existant, le tout vivant, je me sens infiniment vivant.
Ceci est l’expérience de la conscience fondamentale, l’expérience de la pensée, de l’Amour et du feu céleste qui embrasent l’existence. Il y a quelque chose d’extraordinaire à la base de la réalité qui est l’infiniment réel et l’infiniment vivant de la réalité, et quand je peux aller dans cet infiniment vivant, je me sens extraordinairement existant et je comprends que tout est fait dans le monde pour arriver à cet extraordinairement existant. Toute la vie prend son sens dans le passage de l’existence à la plénitude de l’existence.
Pâques est la fête des passages
Pour les juifs c’est le passage de la mer Rouge, lorsque poursuivis par les Égyptiens, ils peuvent échapper à la captivité, et dans le judaïsme, Pâques est devenu la métaphore de la libération de l’homme à l’égard de toutes les captivités. Le judaïsme est structuré autour de la venue du messie qui signifie le libérateur. Le libérateur, c’est le passage de la vie à la Vie en plénitude.
La Vie en plénitude, c’est ce que nous souhaitons du fond du cœur, il nous arrive de la rencontrer dans les moments d’amour, de beauté ou de pensée. Lorsque nous rencontrons la vie en plénitude, notre cœur est pris d’une immense nostalgie, nous nous disons que c’est tellement juste et vrai que nous aimerions que cela vive toujours. Là, nous vivons la Pâque intérieure. Il faut comprendre Pâques comme étant ce qui va nous emmener dans le noyau de notre être, il est indispensable que nous passions de l’extérieur à l’intérieur pour aller vers le supérieur.
Dans le christianisme le Christ joue un rôle central. Les structures de la réalité sont liées à travers l’éthique fondamentale de la trinité. La trinité, c’est le Père source de tout, le Fils transformateur de tout et l’Esprit, l’avenir de tout. La réalité dans laquelle nous sommes est un gigantesque processus de création, de transformation et de recréation. Dans ce processus, je Christ joue le rôle du médiateur qui fait descendre l’invisible dans le visible afin de permettre au visible de remonter dans l’invisible. C’est la raison pour laquelle le christ a une signification cosmique et pas simplement historique. Tout est appelé à la plénitude, tout est appelé à une transformation, tout est appelé à un avenir dont ni vous ni moi n’avons imagination, et le Christ est la clef de ce processus dans la mesure où il fait converger en lui tout ce qui vient du ciel sur la terre et tout ce qui va remonter du visible vers l’invisible.
Ne pas mentir
L’éthique fondamentale de la vie christique consiste à vivre dans la vérité, dans l’intime et dans la communion. Pour rentrer dans la plénitude, il faut être UN. Il n’y a qu’une chose absolue à ne pas faire, c’est mentir, c’est vivre les choses avec une idée derrière la tête. Aimer et être vrai c’est la même chose, c’est être un feu absolu. Tant qu’on n’est pas vrai on ne peut pas aller dans la vie divine. Il faut se purifier, et la confession si mal comprise, est là pour purifier notre âme afin d’accéder à la haute connaissance. Cela nous permet de vivre en communion. Rien n’est plus extraordinaire que de vivre en communion, c’est-à-dire que tout est en moi et je suis en tout, je suis intérieur à tout et tout est intérieur à moi, on est dans l’homme réalisé, l’homme de plénitude.
Derrière l’expérience du Christ et de Pâques, se trouvent les plus hauts mystères de la connaissance humaine et de l’histoire de l’humanité, nous sommes devant les événements les plus profonds qui soient et, malheureusement, nous sommes au-dessous de cette connaissance extraordinaire qui vient à Pâques.
Nous sommes tellement obsédés par nous-mêmes, notre ego et la question sociale qui est une projection de notre ego que nous voyons uniquement Pâques sous la forme de la souffrance et de la récompense. Alors qu’il s’agit de bien autre chose, ce qui n’empêche pas que l’on s’intéresse à la question sociale. Au contraire, mus par la haute connaissance, nous pouvons vraiment apporter une nourriture et des soins à notre humanité qui souffre tant.
La défaite de Satan, la vie et la mort
Il faut comprendre que Pâques est la défaite de Satan et que, sur la croix, ce n’est pas Jésus l’homme, qui est crucifié, mais Satan. Pour comprendre cela, il faut bien comprendre qui est Satan et pour comprendre qui est Satan il faut comprendre ce qu’est le Malin, ce qu’est l’Adversaire et ce qu’est le Tentateur. Le Satan s’inscrit dans quelque chose qui est au cœur de la question de Pâques qui est la vie, la mort et la résurrection. Mais qu’est-ce que la résurrection ? et d’une manière générale, que veulent dire la Vie et la Mort ?
Pour beaucoup, c’est la vie c’est la mort du corps, et la résurrection est quelque chose de miraculeux et de « magique ». Cette vision infantile narcissique nous enfonce dans l’ignorance. La vie c’est moi, la mort c’est lorsque je ne peux pas être moi et la résurrection c’est si je pouvais toujours être moi.
Mais la Vie ce n’est pas cela, la vie c’est la connaissance, la mort, c’est la destruction de la connaissance et la résurrection, c’est le retour de la connaissance. La vie, c’est quand je fais vivre ce que je vis, et en allant au bout ce cette vie, j’arrive dans ce qui est matériel, personnel et transcendant. La vie n’est pas mon petit ego dans lequel je me reconnais, c’est le dynamisme créateur que je suis capable de mettre en œuvre lorsque je vis de tout mon être.
Je peux vivre avec un corps, mais si je ne vis pas cette vie passionnante qui consiste à faire vivre mon existence, je suis mort. La mort c’est d’avoir perdu le fil de la vie et de la connaissance, alors l’humanité a beau exister, il n’y a pas d’humanité. La mort c’est l’arrachement affectif que nous ressentons lorsque quelqu’un que nous aimons disparaît. Ne dit-on pas : « vous avez perdu votre maman », ceci est un langage infantile, c’est le langage d’un enfant qui dit qu’il a perdu sa maman parce qu’il ne la voit plus. Nous sommes infantilisés par une vision stupide de la vie et de la mort qui nous entretien dans notre narcissisme primaire alors que la vie est un extraordinaire dynamisme et la mort est le drame qui se produit lorsque ce dynamisme disparaît. La résurrection, c’est ce qui se passe quand, à l’intérieur de la vie il est possible de revenir à la connaissance que l’on avait perdue, pour vraiment être ce que l’on est.
L’Adversaire
Il importe de comprendre que dans le dynamisme créateur qui est le nôtre, nous faisons une expérience de l’adversaire. C’est une expérience nécessaire pour pouvoir évoluer, nous transformer et aller dans la plénitude.
Il y a un moment dans la vie où il est important de nous opposer à nous-mêmes pour devenir nous-même et si nous ne le faisons pas, nous n’allons pas devenir nous-mêmes et nous allons mourir. Lorsqu’on est simplement ce que l’on est, on cesse d’être. Ce qui permet d’évoluer c’est d’arrêter d’être ce que l’on est pour faire vivre notre être et nous éveiller. Nous rentrons là dans l’expérience de l’opposition créatrice qui nous fait découvrir que rester identique à soi-même, c’est être opposé à soi-même.
Cette loi est constitutive de notre être. Notre propre existence en est l’illustration, nous naissons, nous grandissons, nous acquérons un moi, ensuite viens un moment où nous allons contre notre moi pour aller vers un moi supérieur qui est capable de donner aux autres. Pour aller du moi aux autres, il a fallu passer par l’opposition au moi et découvrir la générosité, l’amour et la relation avec les autres. La vie est faite de moments d’adversité créatrice, l’adversité ressemble beaucoup à ce qui se passe, lorsque nous sommes tennisman par exemple, et que nous avons la possibilité de jouer avec un excellent joueur de tennis, c’est notre adversaire, mais quelle grâce de l’avoir rencontré, il nous fait beaucoup mieux jouer. La vie passe par un certain nombre de combats successifs.
La vie passe par des croix, elle passe par des Christ et par des oppositions créatrices. Le Christ fait coïncider en lui le ciel et la terre, le visible et l’invisible ; Il est par excellence le rassemblement créateur de l’adversité et chaque victoire est une Pâques.
Nous touchons là à une loi fondamentale c’est une loi alchimique qui est la coïncidence des opposés. Quelque chose m’invite à m’opposer à moi-même et ce quelque chose est moi-même, car j’étais dans la paresse de moi-même et je rentre dans le dynamisme de moi-même et grâce à cette opposition, je peux aller dans l’énergie de moi-même. Nous sommes dans une loi de Vie, une loi de résurrection, de Pâques et de passage.
Le Satan n’est pas l’adversaire,
Le Satan c’est la perversion qui apparaît à l’occasion de l’adversité. Le Satan en hébreux signifie le menteur, le diffamateur, et il apparaît toujours au moment de l’adversité. Dans l’Evangile le Satan apparaît lorsque
Le Christ dit qu’il va souffrir et qu’il va mourir, Pierre lui dit que ce n’est pas possible et que cela n’arrivera pas, le Christ lui dit alors : « Arrière Satan » il aurait pu rajouter « Tu crois que la vie est sans opposition et tu veux m’empêcher d’aller dans l’opposition, tu es un Satan ».
Il faut comprendre que le combat et l’adversité, c’est le combat contre la mort, contre la paresse, contre la facilité et à chaque fois que vous devez aller au combat, quelque chose essaye de vous en dissuader. Tout est fait pour nous dissuader d’aller dans le combat intérieur, ce qui fait que l’humanité est de plus en plus faible et de plus en plus violente et perverse, empêchée qu’elle est d’aller dans le combat intérieur.
La semaine pascale est une montée dans la plénitude, c’est ce que veut dire l’expérience de la prière et du jeûne, où nous nous opposons à notre être animal et primaire pour aller dans notre être supérieur. Nous nous opposons à l’être dispersé que nous sommes pour aller vers l’être concentré. Mais nous savons qu’à un moment, nous serons ramenés à notre être primaire et dispersé et qu’il y aura un combat à l’intérieur de nous-mêmes, nous vivrons alors l’expérience du passage et de la Pâque.
Le Malin et Le Jardin d’Eden
Pour comprendre Pâques, il faut comprendre le Satan, nous avons parlé de l’Adversaire, mais il faut également comprendre le Malin et le Tentateur. Les événements que nous vivons à propos de Pâques nous ramènent dans l’essence de l’humanité et l’essence de la vie du Christ.
Nous avons tous entendu l’histoire du Jardin d’Éden et de la chute de l’humanité. On en a souvent entendu un discours infantile auquel nous n’avons rien compris. Il nous a été dit que Dieu a créé Adam et Eve, qu’Il les a mis au milieu du jardin d’Éden, qu’Il leur a interdit de manger du fruit de l’arbre de la connaissance du Bien et du Mal, mais l’homme a désobéi et pour le punir, Dieu l’a chassé du jardin d’Éden.
Lorsqu’on lit ainsi le récit de la Genèse, on n’y comprend rien et on ne comprend pas pourquoi l’humanité souffre autant pour une faute aussi bénigne. Lorsqu’on est totalement ignorant, on imagine Adam et Eve tous nus dans le paradis, Eve qui tend une pomme à Adam et Adam qui mange la pomme.
Rappelons cependant que, dans la Bible il y a deux récits de la création de l’homme. Dans le premier, l’homme est créé mâle et femelle et Dieu met l’homme au milieu de la création en lui disant croissez et multipliez. La première création de l’homme est dépourvue de tout péché et de tout culpabilité. Ensuite vient une deuxième création de l’homme où d’abord, Dieu crée l’homme masculin puis il crée la femme pour que l’homme et la femme aillent l’un vers l’autre et lors de la création de l’homme et de la femme au sens historique du terme et non pas au sens métaphysique, il est question de mettre l’homme dans le jardin d’Éden et de lui dire de ne pas manduquer du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal.
Dans la première création, Dieu a créé l’homme ontologiquement, c’est-à-dire en tant qu’être, et ontologiquement, il n’y a pas de péché., il n’y a pas de chute, tout est positif, tout est créateur, le noyau de l’être est totalement pur. Dans la deuxième création, on rentre dans l’histoire, il y a l’homme et la femme ainsi que l’interdiction de consommer du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et mal. Il y a la femme qui se retrouve toute seule devant tous les arbres du Paradis. Si l’on veut vraiment comprendre quelque chose au récit de la création, il faut supprimer Adam et Eve et remplacer la création par l’intelligence. Eve devient alors l’intelligence profonde et on comprend que le récit de la genèse nous parle de l’intelligence humaine qui est confronté à l’intelligence profonde qui est l’intelligence dite féminine. Dans ce qu’il se passe entre Eve et le serpent, il faut comprendre que celui-ci n’est pas le Mal, ce n’est pas non plus le Diable. Le serpent est, comme le Dragon, le gardien des mystères et il est là pour faire évoluer les êtres humains. Dans la relation entre Eve, l’intelligence profonde, et le serpent, il y a trois moments.
Premièrement le serpent dit à Eve « Dieu vous a dit de ne manger aucun des fruits des arbres du jardin ? » Eve répond que Dieu ne leur a interdit qu’un seul arbre, celui de la connaissance du bien et du mal, et là l’intelligence profonde l’emporte sur le serpent, le serpent dit alors : « Si Dieu vous a interdit de manger du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, c’est parce qu’il est jaloux » et là, l’intelligence profonde ne répond rien, et ensuite arrive le moment de la chute. L’intelligence profonde se retrouve seule devant l’arbre de la connaissance du bien et du mal et elle est séduite, le fruit de l’arbre est beau à regarder, bon à manger et fécond pour l’intelligence. Séduite, l’intelligence profonde prend du fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, elle se retrouve nue et elle en a honte.
Dieu demande de ne pas consommer du fruit de la connaissance du Bien et du Mal parce qu’il veut que l’homme reste dans la plénitude, lorsqu’on est dans la connaissance, il ne faut pas commencer à faire des oppositions, le Bien n’est pas le contraire du Mal. Le Bien est le Bien, la Vie est la Vie, l’Amour est l’Amour, il est l’Amour parce qu’il est l’Amour et non pas parce qu’il est le contraire de la haine. Le Bien est le Bien parce qu’il est le Bien et non pas parce qu’il est le contraire du mal. Il faut vivre les choses avec amour, avec feu et d’une manière entière.
L’intelligence profonde est capable de résister à la provocation, elle rectifie, ce n’est pas parce qu’on m’interdit un arbre que l’on m’interdit tous les arbres. Deuxièmement, ce n’est parce qu’on m’interdit un arbre qu’on est jaloux de moi et qu’on veut m’empêcher d’aller dans la connaissance, l’intelligence profonde ne discute pas là-dessus et elle surmonte cette deuxième épreuve. Il y a un seul point où l’intelligence profonde va faillir, c’est lorsqu’elle se retrouve devant l’arbre de la connaissance et qu’elle est fascinée par l’expérience qu’elle fait de la connaissance. Elle rentre dans une sorte de plaisir infini devant la haute connaissance.
Le péché
Lorsqu’on rentre dans un plaisir infini et que l’on s’auto-séduit, on rentre dans le Mal. Le Mal c’est lorsqu’on se sert du Bien pour se faire plaisir et que l’on ne vit plus le Bien pour le Bien. L’intelligence profonde rentre dans l’intimité de l’intelligence divine, elle est tellement séduite par l’intelligence divine qu’elle se sert de celle-ci pour son propre bien, alors et elle ne respecte plus l’intelligence divine. A ce moment-là l’intelligence profonde se retrouve nue, elle s’est vidée d’elle-même. L’erreur qu’elle fait lorsqu’elle s’est auto séduite et qu’elle se retrouve nue, dépourvue du sens profond et divin de la connaissance, c’est qu’elle en a honte, et c’est cela le péché !
Le grand loupé de l’intelligence profonde lorsqu’elle a commis une faute, c’est qu’elle en a honte et elle cache l’erreur qu’elle a faite, elle ment, et c’est ce qui se passe dans le jardin d’Éden lorsque Adam et Eve se couvrent eux-mêmes avec des feuilles. Et là nous voyons apparaître le Mal à l’intérieur du monde. Le Mal c’est exactement ce qui est dit dans l’expression : « L’erreur est humaine, persévérer est diabolique ».
Adam et Eve ont honte et cette honte les fait rentrer dans la damnation, ils se damnent eux-mêmes et le péché de l’humanité c’est la damnation. On nous tous expliqué que la damnation était la punition de la désobéissance, mais ce n’est pas la damnation qui est une punition, c’est la damnation en tant que telle qui est une faute. Se damner c’est ce qui se passe lorsque je me condamne, je rentre alors dans un orgueil infini car c’est moi qui me juge, je suis maître de tout, je suis maître de la vie et de la mort, je suis maître du Bien et du Mal.
Tout le problème de Pâques, c’est de sortir les hommes de la damnation. Arrêtons de nous damner nous-mêmes ! Arrêtons de nous juger, de nous condamner et de nous damner nous-mêmes. Le Christ et venu dans l’humanité pour nous libérer de la damnation.
Lorsque Adam et Eve se couvrent pour cacher leur nudité, on passe au stade supérieur du Mal et on est dans la perversion. J’ai commis une erreur et je me suis séduit avec l’intelligence mais je ne veux pas le reconnaître et je rentre dans la logique où je vais tout contrôler et je vais moi-même me condamner et me punir. On rentre dans un délire de l’intelligence qui devient une intelligence satanique.
Ce qui est génial dans la Bible, c’est d’avoir vu l’essence de la perversion et du Mal et ce qui caractérise le Christ dans les évangiles, c’est qu’il arrête les logiques de la perversion. Lorsqu’il s’oppose aux pharisiens, aux scribes et aux docteurs de la loi, il leur dit : « vous êtes des hypocrites » ; Nous avons affaire à une humanité qui a décidé de se juger et de se condamner elle-même pour tout dominer. Le problème n’est pas d’avoir mangé le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, le seul problème est celui de la culpabilité et celui de l’orgueil invraisemblable qui se trouve derrière la culpabilité.
Le Christ dénonce en permanence le mensonge des docteurs de la loi, des scribes et des pharisiens qui utilisent la loi divine pour tuer et Le tuer. Sur la croix, le Christ n’accuse personne, et ceci est un événement inouï dans l’inconscient de l’humanité. Ce qui se passe sur la croix, c’est la levée de ce qui s’est passé dans le jardin d’Éden. Dans le jardin d’Éden nous avons affaire à une humanité qui est séduite par l’intelligence et qui, au lieu de reconnaître la séduction, aggrave les choses en rentrant dans un délire de maîtrise à travers l’auto-condamnation. Sur la croix nous avons affaire à quelqu’un qui arrête d’être dans la logique de ce qui nourrit la toute-puissance et la culpabilité.
Le Satan, c’est le Malin qui s’introduit à l’intérieur de nos pensées et qui nous dit : « culpabilise-toi, condamne-toi, suicide-toi et tu vas résoudre les problèmes »
Le Tentateur
Dans les Évangiles, lorsque le Christ a été Baptisé, il est emmené par l’Esprit dans le désert pour être tenté par le Diable. Cela veut dire que le Diable n’est peut-être pas si diabolique que cela et qu’il faut distinguer entre le Satan et le Tentateur.
Le Christ va aller dans le monde et enseigner la haute connaissance. Le Tentateur lui présente trois tentations, premièrement transformer les pierres en pains, deuxièmement sauter du haut du temple, troisièmement l’adorer lui pour avoir tous les royaumes. Si l’on regarde attentivement, transformer les pierres en pains, c’est aller de la terre vers le ciel, sauter du haut du temple, c’est aller du ciel vers la terre, enfin adorer pour avoir le royaume, c’est avoir la plénitude.
Il y a deux manières d’agir et de transformer le monde, la première, c’est de jouer avec tout et la deuxième, c’est d’arrêter de jouer. Le Tentateur propose à Jésus de sauver le monde en transformant « magiquement » les pierres en pain, en transformant le côté terrestre visible, en côté invisible, Le Christ lui répond que l’homme ne vit pas seulement de pain et s’Il transforme la réalité par des prodiges l’humanité ne sera pas véritablement nourrie et ne sera pas sauvée. Il ne veut pas jouer avec l’Homme.
Ensuite le tentateur lui propose de faire « magiquement » descendre le ciel sur la terre en sautant du haut du temple, Le Christ répond que, de la même manière qu’il ne joue pas avec l’homme, il ne joue pas non plus avec Dieu, Il ne tente pas Dieu parce si on joue avec Dieu le ciel ne sera pas le ciel.
A la troisième tentation « Je te donne tous les royaumes et tu m’adores », le Christ répond qu’il ne joue pas avec le royaume. Le royaume c’est de ne pas adorer autre chose que la royauté céleste.
La Pâque est une expérience de mutation et de connaissance qui nous permet de passer de la vie à la Vie qui EST. Nous rencontrons des moments d’adversité qui sont des moments créateurs, nous devons nous opposer à nous-même pour aller vers la dimension supérieure de nous-mêmes. Cela passe par le jeûne, par la prière et par la vérité, être fondamentalement UN, aligné et dans l’axe. Mais sur le chemin de la Pâques, à un moment ou à un autre, nous avons affaire au Satan, Il vient toujours sur le mode de la séduction, le Satan, c’est la facilité et c’est le mensonge.
Spirituellement, il est passionnant de voir les moments où nous sommes dans la séduction ou dans le mensonge. Cela nous ouvre les yeux sur ce qui est autour de nous et sur nous-mêmes, nous sommes entourés d’une phantasmagorie, beaucoup de choses sont des mensonges et on nous raconte des histoires, mais nous-mêmes, nous nous racontons des histoires, et lorsque nous le reconnaissons, nous ressentons une légèreté et une sorte de paix céleste venir en nous.
Le sens profond de Pâques est de sortir l’humanité des logiques suicidaires et de mort dans lesquelles elle se trouve.
Pour aller sur la croix, il faut le faire, il faut oser, un moine m’a dit un jour : « Il y a une seule chose que Satan ne peut pas faire, c’est aller sur la croix » le Christ y va, et là, il y a quelque chose de sidérant. Nietzsche, pourtant antichrétien, lorsqu’il a affaire au crucifié, s’incline et reconnaît qu’il y a quelque chose qui le dépasse.
Question 1
Pouvez-vous repréciser la différence entre le Tentateur le Malin et le Satan ?
Le Satan c’est le mensonge, le Malin n’est pas le Satan. Dans la vie on est confronté au Tentateur et c’est bien. Cela me fait penser à Job lorsque Dieu accepte de laisser faire le Tentateur. Il y a une entente entre le Tentateur et Dieu, cela veut dire qu’à certains moments nous devons accepter d’être confrontés au Tentateur, au Malin ou à l’Adversaire et Dieu est d’accord avec leur existence mais pas avec celle du Satan, qui est le pervers qui va dévoyer les choses. Le Tentateur et le Malin sont des provocateurs et la provocation n’est pas forcément négative, elle nous fait avancer. Cependant, il peut y avoir une manipulation perverse à l’intérieur de la provocation. Le véritable problème est celui du mensonge, dans les Évangiles, le Christ est impitoyable avec les mensonges des pharisiens, des scribes et des docteurs de la loi.
Dans le jardin d’Éden, Le Tentateur ou le Malin, fait progresser Eve car à deux reprises, lorsqu’il lui pose des questions, elle gagne. Une première fois en répondant que Dieu ne leur a pas interdit tous les arbres et une deuxième fois en n’approuvant pas le fait que Dieu puisse être jaloux. Là où elle chute, ce n’est pas lorsqu’il y a le Malin, mais c’est lorsqu’elle est toute seule, qu’elle commence à voir l’arbre et qu’elle le trouve bon, qu’elle en mange et qu’elle a honte.
Dans les Évangiles le Tentateur pose les bonnes questions au Christ et à chaque fois que le Christ donne la bonne réponse, le Tentateur disparaît. Il n’y a qu’une seule chose qui est véritablement grave, c’est le fait que l’humanité se condamne elle-même. Et cela fait penser à cette parole que l’on trouve dans l’Épître de Jean : « Si ton cœur te condamne, sache que l’amour de Dieu est plus fort que ton cœur ». Là nous avons l’essence de Pâques et de la résurrection. D’un côté il y a une humanité qui se condamne et qui est dans un orgueil terrible derrière un désespoir, et d’un autre côté il y a autre chose qui vient. Pâques nous dit que Dieu n’est pas là pour condamner. Il y a l’épreuve du Malin, l’épreuve du Tentateur et l’épreuve de l’Adversaire, et puis il y a la perversion liée au mensonge.
Je vous livre une expérience très personnelle, dans mes rituels de prière le soir, si je reconnais humblement mes mensonges, mes tricheries, j’ai le sentiment que le ciel s’ouvre et c’est magnifique. Je peux vous dire par expérience de prière et de cœur que reconnaître à un moment que l’on triche, que l’on ment, que l’on raconte des histoires, c’est un lance-flammes et c’est quelque chose d’extraordinaire pour la purification de l’âme. Je crois que cela va très loin dans le psychisme et dans le corps. Pendant toute notre vie, les êtres que nous sommes, par honte, par orgueil, par désespoir, nous charrions des mensonges, nous n’osons par reconnaître et dire les choses telles qu’elles sont. Reconnaître le mensonge, spirituellement, c’est une résurrection, c’est passer de la mort à la vie.
Question 2
Le mensonge ultime ne serait-il pas de croire que parce qu’on a menti ou mal fait, nous ne sommes pas aimés de Dieu ?
Il y a une parole du Talmud qui dit : « Je te pardonnerai tous tes péchés, sauf de penser que Dieu ne t’aime pas », et on touche là au point le plus extraordinaire de la relation entre Dieu et l’homme. On pense que Dieu va venir juger et condamner l’humanité alors que c’est exactement l’inverse qui se produit. Nous devons arrêter de nous juger et de nous condamner. Le fait de nous faire penser que nous avons fait trop de mal pour être aimé de Dieu, est l’ultime ruse du Satan pour continuer à tout maîtriser.
En ce sens le suicide est la chose la plus abominable qui soit. Je distingue le malheur de pauvres personnes qui, dans un état de confusion, mettent fin à leurs jours (et j’ai beaucoup de compassion pour cela), du raisonnement intellectuel qu’il y a derrière les logiques suicidaires qui sont d’un orgueil absolu. L’humilité est d’accepter d’être aimable malgré tout. En acceptant que Dieu nous aime, nous faisons une des œuvres les plus magnifiques car nous guérissons de l’orgueil. En acceptant d’être aimé tel que l’on est, on coupe le mal à la racine. Dans Pâques nous avons un Dieu qui ne condamne personne.
Dans l’Évangile de Mathieu, lorsque Jésus est devant Pilate, Pilate dit qu’il ne voit aucune faute dans cet homme, il se lave les mains en disant ; « Je suis innocent de son sang » et la foule répond : « que son sang retombe sur nous et sur nos enfants », en disant cela, la foule se damne elle-même. Pour tuer le Christ, elle se condamne, elle veut condamner le Christ, elle sait que c’est mal, et elle se condamne pour pouvoir condamner le Christ. On est dans la condamnation absolue et c’est la phrase la plus ahurissante des Évangiles.
Le problème, c’est de laver l’humanité de la honte, de la culpabilité et de l’auto-condamnation. A Pâques, le Christ va chercher les damnés en enfer, on est dans le combat absolu et transcendant. L’humanité n’arrête pas de se damner, et Dieu est celui qui vient arrêter la damnation.
Question 3
La culpabilité peu disparaître lorsqu’on se rend compte que notre attitude est liée à un conditionnement.
Effectivement c’est un moment tout à fait génial de la connaissance de nous-mêmes ? Seule la conscience absolue qui est en nous est capable de voir le conditionnement à l’égard de nous-mêmes. C’est pour cela qu’il est dit : « si tu ne comprends pas que tu es esclave tu ne pourras jamais être libre ». Cela est très profond car en comprenant ce qui n’est pas moi, je comprends ce qui est moi. Ceci est au cœur de toute la mutation spirituelle et, à un moment, on peut se rendre compte que toute notre vie nous avons parlé un langage qui n’était pas le nôtre et que nous étions asservis à un conformisme social. Là nous touchons le point extraordinaire de la libération intérieure.
Question 4
Pouvons-nous mettre en relation le passage de la condamnation de Jésus avec la responsabilité et la figure du héros spirituel qu’est l’archange Michael ?
Il faut voir que lorsque le Christ apparaît, c’est un combat titanesque à l’échelle de tout le cosmos, cela est non seulement important dans un cadre religieux, culturel et historique mais également dans un cadre métahistorique. L’archange Michael est celui qui perce les mystères et combat les dragons, il est capable de provoquer des évolutions célestes. Dans les hiérarchies angéliques telles qu’elles sont développées par Denis l’Aréopagite dans sa théologie des hiérarchies célestes, les anges et les archanges jouent le rôle du démarrage et de l’ouverture.
Dans un langage imagé, il nous est dit que l’expérience de la vie et de la connaissance, c’est de percer les mystères et de s’ouvrir à la connaissance céleste qui est dans notre cœur et qui est l’ouverture à la réalité qui EST.
Vous pouvez faire cette expérience lorsque vous vivez de tout votre être en étant attentif, concentré et présent à ce que vous faites. Si vous rentrez dans cette dimension de présence à ce que vous faites, d’abord, cela change le pratico-pratique de la vie, et après, vous commencez un dialogue qui vous enrichit et qui vous ouvre des portes. Dans tous les domaines, la vie se facilite ou donne des épreuves intéressantes et ensuite des intuitions vous sont données et des niveaux de connaissance se révèlent.
Les archanges sont les grands gardiens entre le monde terrestre et le monde céleste, ils viennent pour percer et révéler les mystères. On le voit très bien dans la relation entre Pilate, la foule et le Christ, nous avons affaire à quelque chose de crucial. Pour condamner le Christ qui est innocent, la foule se damne et se condamne elle-même. Et ce qui se passe devant Pilate, se trouve déjà dans le jardin d’Éden. La damnation est déjà présente à travers Adam et Eve qui se trouvent nus et en ont honte.
Ce qui est intéressant, c’est que dans la première création, Adam et Eve étaient nus et n’en n’avaient pas honte (c’est précisé dans le texte). Mais dans la deuxième création, ils ont honte et c’est là que se trouve le vrai problème. Le problème dramatique de la honte, c’est qu’elle amène la culpabilité qui amène la damnation.
Pâques vient nous libérer de tout cela.